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Un titre... euh... je peux réfléchir ?
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Point de nombrilisme, enfin, j'espère ! Plutôt le récit des choses du quotidien ou de l'actu qui m'auront fait réagir. Quelques préférences à faire partager... Hop !
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19 novembre 2007

Le Blues du Camembert

Je suis rentrée bien déprimée du supermarché. Il faut dire que, quelques jours auparavant, j'avais regardé un documentaire fort intéressant sur Arte, "La Guerre du Camembert" réalisé par Yvonne Debeaumarché. Vous l'aurez compris, il est ainsi question de la fabrication du Camembert. Dans cet univers impitoyable, industriels et producteurs indépendants s'opposent, représentés respectivement dans notre émission par Monsieur Luc M. Directeur de Communication du Groupe Lactalis et par Monsieur Philippe M. fromager normand "traditionnel" depuis 40 ans. J'ai ainsi retenu que les petits producteurs, l'un après l'autre, ont presque tous été rachetés par deux gros groupes agroalimentaires (dont Lactalis) qui se partagent aujourd'hui la quasi totalité du gâteau.

Monsieur Luc M. (Lactalis) nous explique dans un premier temps que cette production en masse (possible car les industriels ont les moyens financiers d'avoir de grands centres de production modernes et disposent d'énormes budgets Marketing, Packaging, Communicating et Publiciting) permet la distribution du camembert dans le monde entier et offre (comme c'est généreux) une liberté de choix aux consommateurs.

Ce ne serait qu'un moindre mal si la bagarre ne se situait pas aujourd'hui sur un autre plan. En effet, l'absorption n'était que la première étape. La seconde a consisté à changer la méthode de fabrication et ces bons vieux camemberts ne sont plus fabriqués à partir de lait cru mais à base de lait thermisé (chauffé à 2 degrés de plus, on dit qu'il est pasteurisé). La comparaison est un peu simpliste, mais, pour moi, c'est comme si on faisait cuire le raisin avant d'en faire du vin... C'est alors qu'intervient le mot magique "AOC". Car, malgré les pressions, l'Administration maintient que, sans lait cru, pas d'AOC pour les camemberts industriels. Et c'est là que le bât blesse, car la mode dans les supermarchés étant à nouveau au terroir, à l'illusoire authentique, l'absence de ce précieux sésame, si le consommateur se met à y prêter attention, risque de générer un sérieux manque à gagner pour ces deux géants ou du moins d'entâcher leur image. Il est donc impératif pour Monsieur Luc M. de modifier l'AOC !

Logo_AOC

Monsieur Luc. M (Lactalis) avance alors l'argument de l'hygiène publique. Avec sa méthode de fabrication, plus aucun risque pour le gourmet. Le camembert est devenu tout beau, tout propre, tout blanc et même il n'a presque plus d'odeur. Intervient alors notre outsider, Monsieur Philippe M. qui précise, au risque de nous effrayer, qu'un camembert au lait cru se fabrique gràce à sa "flore lactique sauvage" alors qu'en utilisant du lait thermisé (quasi pasteurisé), on doit réintroduire de la "flore de culture". Il précise également que si l'AOC a pu être maintenu en l'état, c'est parce que de nouvelles normes d'hygiène draconiennes ont été mises en place. Les petites productions ont - elles aussi - des allures d'hôpital, tous les intervenants de la chaîne de fabrication sont vêtus de combinaisons blanches, portent de petits bonnets de nuit (blancs) et partout on pousse (manuellement) de petits chariots à roulettes. Il m'apprend aussi que le camembert au lait cru subit au moins une quinzaine d'analyses (lystéria, salmonelle, staphylocoque...) ce qui représente 12% du prix de revient d'un fromage. Et la plus minuscule des bactéries trouvée entraîne la destruction de toute la production. Un prix de revient qui se ressent évidemment dans le panier de la ménagère mais aussi dans les poches de nos industriels qui évitent toute cette batterie d'analyses.   

Camembert

De jolies images en noir et blanc terminaient ce documentaire. Des images d'avant guerre, d'un autre monde. "Quand la flore du lait était plus diversifiée et le goût plus fort. Quand le camembert était affiné dans les caves des fromageries et non dans les rayons des supermarchés. Quand on savait déterminer différents crus de lait en dégustant un fromage, comme on distingue un bordeaux d'un bourgogne".

Ce jour là, au supermarché, j'ai voulu vérifier. Direction "rayon fromages" puis "sous-rayon camemberts", là où, d'habitude, je choisis presque les yeux fermés vérifiant juste que la date limite de consommation ne soit pas trop éloignée. Stupéfaction, je constate que plus aucun camembert ne porte la mention "au lait cru". La voilà donc, cette nouvelle liberté de choix que m'offre Monsieur Luc M. (industriel sauveur du consommateur). Après avoir attentivement étudié toute la floppée de marques, me voilà en train de chercher un rayon "épicerie fine" ou "produits marginaux" où j'ai trouvé UN camembert portant effectivement la bonne mention et estampillé du fameux AOC, deux fois plus cher que les ersatz. Mais ce n'est pas sans une certaine fierté que je l'ai placé dans mon panier. Car, comme le concluait le documentaire, "le devenir du camembert est entre les mains du consommateur souverain".

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Commentaires
C
CouCou Gwen. <br /> Trimballer un véritable "Epoisses" de Lorraine en Languedoc où je vis, ce n'est pas une mince affaire... Disons que si on ne prend pas toutes les précautions nécessaires, le voyage est fort parfumé. Et celui que je trouve chez moi au supermarché n'a vraiment rien à voir. Alors, ici, je n'en achète pas. <br /> Comme tu dis, rien de grave. Mais les produits locaux, fabriqués dans la tradition, ne doivent pas pour autant disparaître ! En France, nous avons encore le choix entre le camembert de merde et le "goûtu" camembert, qu'on peut trouver à des prix très raisonnables (je suis en train de faire le tour des différents supermarkets). <br /> Ce que je trouve grave, c'est que les industriels nous prennent pour des imbéciles avec leurs faux arguments et leur manque de transparence. Et en exagérant juste un poil, je crois que nous ne sommes pas très loin de l'univers décrit dans le film "l'aile ou la cuisse".<br /> Bises.<br /> <br /> PS : j'aime aussi la vache qui rit.
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G
Ma consommaion de fromage a changé depuis que e suis arrivé ici...<br /> Finit les fromages fermiers du marché, au lait cru, au lait de brebis, etc...<br /> Ici le fromage coute plus cher que l'or et voyage mal en avion ou en bateau...<br /> Ici, le fromage a porter de toutes les bourses vient de Nouvelle Zélande ou d'Australie, il est vendu sous plastique toujours des pâtes cuites il ressemble à la vache qui rit...<br /> C'est drôle mais avec le temps j'aime bien ce fromage...<br /> Mais quand je me sents riche je m'achète du roquefort industriel...<br /> quand on y pense c'est pas très grave, on trouve autre chose !<br /> Nous avons les meilleures crevettes du monde<br /> <br /> <br /> <br /> *Fromage est une insulte ici
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C
... était suivi d'un débat avec deux invités, dont un allemand (Tim Mälzer). Et alors, le plus étonnant (faut-il en rire ou en pleurer ?), c'est que c'est encore Tim Mälzer, restaurateur à Hambourg, qui défendait notre bon vieux fromage. Il disait que le jour où il a goûté un camembert au lait cru, ça a été "une explosion de goûts dans sa bouche, quelque chose d'absolument unique". D'ailleurs, ne pouvant trouver de camemberts au lait cru dans son pays, il préfère ne pas en proposer à sa clientèle plutôt que de proposer ceux des industriels qui n'ont "goût à rien". Il a dit encore que "quand on lance un nouveau produit en s'inspirant d'une recette traditionnelle, il faudrait avoir le courage de dire que c'est un autre produit, lui donner un autre nom en précisant 'fabriqué façon camembert' et cela pour ne pas tromper le consommateur". Il a précisé également que "la bouffe industrielle, c'est comme le porno : sans goût, sans variété, standardisé".<br /> Merci Tim.<br /> <br /> Bonne idée ta compil. Et oui oui, je suis preneuse ! Ambitieux projet, car il n'est pas simple d'y voir clair et la vigilance, à mon avis, s'impose non seulement dans notre démarche "achats" mais aussi dans le tri des nombreuses infos (intox ?) que nous recevons aujourd'hui (phénomène de mode médiatisé oblige) de toutes parts. Mais, avec un peu de bon sens, on doit pourvoir y arriver.
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B
Au sujet de la manière dont notre nourriture est produite, j'ai vu au ciné le film : http://www.we-feed-the-world.fr/<br /> Plus que déprimant : effrayant...<br /> Je ne fais plus les courses de la même façon. D'ailleurs, c'est assez aberrant de faire les courses, mais comment faire autrement ? A moins de tout produire soi-même ou de se fournir auprès de producteurs "sains"...<br /> Ta note m'intéresse beaucoup, ainsi que tous les articles conso, bio et environnement qui paraissent dans le Canard Enchaîné. (Je pense en faire bientôt une compil' sous fichier .pdf. Si cela t'intéresse, je pourrais te l'envoyer (non pas pour te déprimer, mais te donner des infos pour être une consommatrice encore plus vigilante :-))
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